( 42 ) Heureux les Québécois ?

9 octobre 2007 - «Tout le monde est malheureux, tam ti delam » chante notre troubadour national, Gilles Vigneault. Sommes-nous aussi malheureux que le dit la chanson du poète de Natashquan? Le récent sondage Crop-LaPresse de septembre 2007, semblerait faire mentir les paroles du célébrissime poète puisque environ les deux tiers des gens se disent heureux: 61% des gens se disent tout à fait satisfait de leur vie et 35% en sont plutôt satisfait. Étonnant!

De tous les facteurs qui manquent à leur bonheur, les Québécois signalent celui du temps. C’est vrai, il faut du temps pour être heureux, pour organiser quelque peu des espaces de bonheur. Nous sommes dans le siècle du cyberespace, dans une société qui bouscule plus souvent qu’autrement nos manières de vivre et de faire: la garderie le matin, le boulot qui ne finit plus, les courses après le travail, les heures supplémentaires pour boucler le budget, les activités sportives des enfants, le coiffeur, la maintenance des deux voitures, l’entretien de la propriété et la promenade du chien. Ouf! En y pensant bien, que vaut la vie s’il ne reste plus de temps pour s’émouvoir, s’attendre, aimer? Au fait, n’est-ce pas le temps qui tisse les jours, fait et défait les projets, les aspirations, l’être humain?

D’après ce coup de sonde publié samedi dernier, les sources du bonheur des Québécois sont très classiques: la famille (33%), la santé (24%), l’amour (15%). N’est-ce pas là des ingrédients essentiels dans la fragile stabilité de nos vies? Cependant, le travail ne semble plus représenter une source de bonheur (1%). L’époque du workaholic serait-elle bien révolue dans l’esprit des gens? Certes l’argent ne nuit pas au bonheur et d’après les données du sondage, les moins scolarisés se montrent neuf fois plus mécontents (9% le sont) que les plus riches. Intéressant de constater que les Québécois sont plus heureux qu’on ne l’aurait pensé et que souvent nous laisse croire la presse à potins ou encore certains baratineurs de tribunes téléphoniques.

Jamais une époque n’a été aussi spectaculaire que la nôtre: l’espérance de vie ne cesse de battre des records, la médecine fait des miracles chaque jour, les progrès technologiques nous éblouissent, les pays n’ont plus de frontières, les distances n’ont plus d’importance, etc. Pourtant les râleurs du pessimisme ambiant font la une des manchettes journalistiques. Il semblerait que dans ce monde épris de morosité, il faut râler à gorge déployée pour être crédible. Plus tu critiques, plus tu es respecté dans certains milieux; plus tu parles d’harmonie et de succès, plus tu passes pour un rêveur, un utopiste. Sommes-nous en train de développer le culte du narcissisme à outrance, une sorte de contresens historique de notre vécu en société.

Certes, il y a des situations problématiques à résoudre, mais le son cloche de ce sondage nous indique que nous saisissons mal le cœur des gens; il est vrai qu’il n’est pas facile d’évaluer les états d’âme. Nous sous-estimons trop souvent la capacité des gens d’affronter la vie, de rebondir et de se construire une oasis où leurs valeurs fondamentales sont protégées et où elles peuvent s’exprimer minimalement. Une question essentielle doit être posée un jour ou l’autre dans le parcours de nos vies: Qu’est-ce qui me rend fondamentalement heureux?

Notre société de la superconsommation et de ses marchands d’illusion nous proposent des recettes de bonheur plus éblouissantes les unes que les autres. Pour ma part, je crois fermement au petit bonheur qui se tisse au fil des simples gestes du quotidien: un mot d’encouragement, un regard d’enfant qui nous décroche un sourire, une marche dans l’immensité de nos forêts, une main tendue à celui qui peine, une tape sur l’épaule. Le bonheur est une chose qui se vit au quotidien, qui se sent dès le lever du jour, et non qui se raisonne au bout de savantes réflexions. Ça se sent! «Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux?» chantait Ray Ventura. Un peu de temps!


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2 commentaires:

Auditeur RVM a dit...

Merci pour la réflexion sur la confiance. Cela m’inspire et devrait inspirer ceux qui nous dirigent. Cela doit commencer dans la famille. Tout part de là! Malheureusement, on ne sait plus vivre en famille qu’elle soit traditionnelle ou recomposée. Il faut réapprendre à vivre ensemble! Félicitations. (C. P.)

leravisseur a dit...

Intéressant ce texte! Il faut du temps pour faire confiance à quelqu'un, cela prend du temps pour refaire confiance. La confiance est à deux tranchants. La confiance aveugle, c'est dangereux!