( 114 ) Un besoin de renaître

14 mars 2008 - Le monde a changé; le Québec cosmopolite et interculturel n’est plus le même. Tous conviennent que la religion dans l’espace public en a pris pour son rhume depuis les années 60. On peut se demander ce qu’il reste à part les monuments qui façonnent encore nos villes et villages, les congés fériés que nous soulignons avec faste d’une manière laïque, les cérémonies de baptême et de funérailles qui rassemblent toujours même s’ils sont en régression constante, quelques recettes de la religieuse la plus connue du Québec, Sœur Angèle. Aurions-nous perdu, au fil des années, un peu de nous-mêmes, de notre identité, de notre âme collective, de ce qui faisait notre raison de vivre, de ce qui nous donnait l’étincelle pour innover, changer le monde? L’automne 2007, celui des accommodements raisonnables, aura tout de même brassé pas mal des nôtres, plus profondément qu’on le laisse paraître.

Nous en sommes bien revenus de ces années où tout était possible avec un peu d’instruction, de valeurs et de ténacité. Vous vous en souvenez, il s’agissait d’avoir une bonne idée et du cœur au ventre et tout était accessible. Rien n’est parfait et durable dans ce monde! Nous avons vécu le désenchantement au fil des décennies et éprouvé une certaine nostalgie sans l’affirmer trop ouvertement. De nombreux témoignages et confidences me parviennent régulièrement et m’étonnent toujours, mais pas assez puissants pour rebrousser chemin; en fait, c’est fini ce temps à jamais.

Nous avons connu les années glorieuses des babies boomers qui, dans moins d’une décennie, seront pratiquement tous à la retraite. Ces gens qui ont rêvé, créé, innové et même prié sur tous les fronts seront, comme beaucoup d’autres, sur leur déclin pourvus d’une manière générale de bonnes prestations de la caisse de retraite, de REER en quantité enviable, de pensions gouvernementales appréciables et sans doute de quelque argent tassé ici et là dans des fonds de tiroir. Il faut dire d’emblée que ce n’est pas tout le monde qui a été aussi prévoyant et chanceux. Je me suis demandé, il y a quelques jours, ce qu’on avait gardé, engrangé de son bagage spirituel?

Le dimanche qui vient, sur le plan ecclésial, sera celui des Rameaux, rappel de ce jour où, selon les Écritures saintes, Jésus de Nazareth entra triomphalement au cœur de la ville de Jérusalem, monté sur une ânesse. Ceci marque encore aujourd’hui le début de la grande semaine sainte qui nous mènera à Pâques. Semaine où plus d’un milliard de chrétiens dans le monde célébreront la mort et la résurrection de Jésus de Nazareth. Ce n’est pas rien! Quelle étrange monture pour entrer dans une capitale! Mais que reste-t-il dans nos mémoires collectives de cette période de la semaine sainte vécue chez nous, il n’y a pourtant pas si longtemps que cela dans le fond, collectivement et massivement? Je me souviens de ces processions interminables, des chemins de croix éreintants, des confessions à la file indienne, des retraites paroissiales clamées d’une voix tonitruante, des petits pains du jeudi saint, du jeûne obligatoire et de tout le reste. Mes amis, Pâques sera des nôtres dans neuf jours.

D’ici là, nous aurons droit à quelques centaines de catholiques qui déambuleront dans les rues de quelques villes du Québec avec le traditionnel Chemin de croix, à des cérémonies religieuses regroupant des assistances de quelques dizaines de croyants désirant faire leur Pâques. Jésus aurait-il fui nos temples, ma foi? Dire que plus de 80% des Québécois se déclarent toujours catholiques; même si l’Église a procédé à beaucoup d’adaptations depuis les années 60, elle ne réussit toujours pas à attirer ceux qui se réclament catholiques.

S’il y a une fête religieuse qui devrait nous relancer c’est bien Pâques. C’est la fête de la vie, une vie qui reprend, qui fracasse les murs de l’indifférence. Pâques, c’est la victoire sur la mort, sur les vicissitudes de la vie, sur le désespoir. L’aventure de ce Jésus de Nazareth vient toujours bousculer notre façon de comprendre le monde, l’histoire et l’avenir. Certes, nous aurons droit à quelques vieux films classiques à la télé, à de nombreux concerts, à quelques pages dans les journaux quotidiens, souvent plus commerciales que spirituelles. Pâques risque de se passer chez un bon nombre de Québécois autour d’un bon repas avec le traditionnel jambon bien arrosé de vins capiteux. Complétons cela avec quelques œufs en chocolat bien colorés, dégustés en se léchant les babines, avec une petite tournée à la cabane à sucre et avec une visite de nos parents âgés et de quelques amis.

Pourtant, cette fête a de quoi rassembler, elle est lumineuse. Il faut dire qu’avec l’hiver que nous vivons, nous avons besoin plus que jamais de lumière. Je reste convaincu qu’à travers nos histoires mouvementées, nos blessures de la vie, le Dieu de la vie fait son entrée moins triomphalement, mais plus discrètement dans le questionnement des nôtres. Ce n’est pas vrai que le matériel, la carrière, la fête remplissent totalement nos vies, nos âmes. Nous avons tous besoin d’un supplément d’âme qui se trouve au-delà des pâquerettes. À quelque part, dans le parcours de nos humbles vies, le Dieu d’amour, que plusieurs ne peuvent plus nommer, surprendra dans toute sa tendresse et son amour.

S’il y a une fête qui pénètre discrètement notre cœur, c’est bien Pâques car c’est celle de la lumière qui entre tout doucement par les fissures de nos vies fragilisées et lézardées. Un jour, l’arbre desséché reprendra sa vigueur, renaîtra car la lumière y aura fait son œuvre. Que cette semaine qui nous conduit à la grande fête de Pâques nous redonne courage et un nouveau regard sur nous et sur notre monde meurtri en attente de renaissance et de résurrection. Pâques peut nous relancer, nous aider à refaire des choix et à redire, avec l’appui de nos proches, ce que nous sommes, ce que nous voulons devenir et en qui nous croyons. Pâques, c’est la fête de l’impossible devenu réalité! Il faut y croire, mes amis! Bonne route vers la lumière de Pâques!

Commentez cet article :
LeblogueduDG@gmail.com

( 113 ) Tout un cinéma!

7 mars 2008 - Le gouvernement Harper s’est mis à dos le monde créatif du cinéma et de la télévision. Le projet de loi C-10 a suscité la grogne des gens du septième art et du petit écran, car, semble-t-il, il y a dans ce fameux projet de loi une phrase qui rappelle, selon les réalisateurs et les producteurs montés aux barricades, la censure, les anciennes restrictions de l’Église et de l’État, des vestiges de la Chine communiste, rien de moins, mes amis. Ils ne dérougissent les «tourneux» de films. Les mots du projet de loi C-10 qui ont choqué l’industrie des grand et petit écrans sont les suivants: production jugée «offensante» ou «contraire à l’ordre public». Voilà ce qui énerve tout le beau monde de ce paradis de l’imaginaire et souvent du superficiel!

Au nom de la démocratie et de la liberté d’expression, les producteurs demandent tout simplement au gouvernement Harper de modifier dans les plus brefs délais cette grossière offense à l’industrie cinématographique et télévisuelle. La ministre Josée Verner n’a nullement l’intention de lever le petit doigt sur tout cela. Les députés de l’opposition n’y ont rien vu en Chambre et le tout est maintenant rendu sous les yeux scrutateurs de nos chers Sénateurs à majorité libérale, pour un bon nombre approchant la sénilité merci. Ils en sont en troisième lecture et eux aussi n’avaient rien vu de répréhensible ou d’offensant. Que penser de tout cela?

Il est vrai que les mots choisis par le gouvernement Harper ne sont peut-être pas les meilleurs. Mais il me semble, même devant les tapageuses revendications au nom de prétendus droits à la démocratie et à la liberté, qu’il s’avère nécessaire de regarder de plus près ce qui se produit et ce qui est subventionné dans notre immense pays. Il faut dire que les représentants des milieux de production ont riposté avec des arguments assez fermes. Cependant, il me semble que les contribuables canadiens ont droit de savoir ou de connaître où vont leurs deniers. Quelle est la place faite à la violence, au sexe et j’en passe dans nos productions? Qu’est-ce que nous montrons aux jeunes générations qui grandissent chez nous. Ce n’est pas d’aujourd’hui que diverses associations dénoncent la violence sur les écrans des cinémas et des téléviseurs. Un sondage auprès de la population étonnerait sans doute bien des producteurs.

Ce n’est pas vrai qu’au nom de la démocratie et de la liberté l’on doive financer des productions médiocres, scabreuses ou douteuses. Je me suis souvent questionné en arrivant à la fin d’un film subventionné par Patrimoine Canada. Je me demandais pourquoi on avait octroyé notre argent à un tel navet? Démocratie, liberté ou inertie? Ce n’est pas au nom de la censure qu’il faut aborder toute cette production cinématographique et télévisuelle, mais au nom de l’éthique. Est-il éthiquement acceptable de produire tel film ou telle émission télévisuelle? À qui s’adresse-t-on et à quoi veut-on en venir?

Certains journalistes ont pointé du doigt la droite religieuse; elle serait à l’origine de ce projet de loi. Qu’est-ce que ce potinage de bas étage apporte de plus dans ce débat? Je le répète, ce n’est pas une question de censure, de droite religieuse ou de je ne sais quoi. L’éthique établit des critères pour juger si une action est bonne ou mauvaise et pour juger les motifs et des conséquences d’un acte. Ce n’est pas un savoir que l’on veut conquérir; mais un éclairage pour agir de manière responsable. N’y a-t-il pas lieu de faire un discernement pour favoriser la santé de notre patrimoine filmique et télévisuel?

Qu’est-ce qui est éthiquement acceptable ou responsable de produire pour le public canadien? Doit-on promouvoir des productions qui prêchent outrageusement l’individualisme, l’hédonisme, le matérialisme et la violence dans notre société? De nombreuses coalitions de parents dénoncent le traitement que l’on fait de la femme, de la violence, du sens même de la vie dans certaines productions. Nous sommes loin de la question du conservatisme religieux ou de la censure. Nous ne sommes pas uniquement devant une question de fric; nous avons aussi à faire à des questions de sens, de valeurs communes et sociétales. Doit-on au nom de la démocratie et la liberté tout permettre?

Il est vrai qu’il est possible de contrôler autrement les productions. Je suis convaincu que les contribuables canadiens, au grand dam de nos producteurs, désirent des films et des émissions qui inspirent, donnent quelque chose de plus à travers les vicissitudes de la vie. Je ne parle pas des productions à l’eau de rose, mièvres et imbuvables. J’ai des films que j’ai regardés des dizaines de fois parce qu’ils inspirent, donnent un petit quelque chose de dignité, de grandeur, de beauté. Il me semble qu’une production cinématographique ou télévisuelle de grand public doit nous amener plus loin, doit dépasser le «je te tire dessus, tu meurs». Ce n’est pas aisé de porter un jugement sur tout ce qui produit chez nous. Je reste convaincu qu’un bon nombre de Canadiens bien-pensants ne sont pas insensibles à un certain discernement sur tout ce qui se tourne pour nos salles de cinéma et pour la télévision. Rien qu’à voir, on voit bien!


Commentez cet article :
LeblogueduDG@gmail.com