( 24 ) Le syndrome du mal aimé

13 septembre 2007 - Avez-vous entendu parler de Brian Mulroney ces jours-ci? Difficile de le manquer, car c’est la figure de proue de la rentrée automnale et de la convergence médiatique, gracieuseté de l’entreprise Quebecor. À l’aube de ses 68 ans, l’ex-premier ministre vient de publier une autobiographie de 1200 pages sous le titre tout simple de Mémoires. Mais voilà que cette rentrée à grand renfort de publicité prend l’allure d’un règlement de comptes. C’est bien en se coulant dans les règles du mélodrame ou du roman-feuilleton qu’on nous permet d’absorber des révélations livrées au compte-gouttes. On nous maintient dans un suspense à connotations juteuses et exclusives bien apprêté par l’entreprise médiatique de la convergence dont Monsieur Mulroney est membre du conseil d’administration. Comment un homme de la stature et de la trempe de Brian Mulroney a-t-il pu se laisser prendre dans une telle mise en scène?

Dire qu’il m’était devenu sympathique ce Brian! Avec un peu de recul et peu plus discernement, je commençais à découvrir l’importance du parcours politique de l’ex-premier ministre dans l’histoire canadienne; il m’était même devenu presque un symbole d’audace dans l’adversité. Loin de moi l’idée de vouloir me transformer ici en analyste politique. Depuis la fin de son mandat à la tête du pays le 25 juin 1993, notre ex-premier ministre à la voix chaleureuse était demeuré loin des caméras et des projecteurs.

Passablement discret, il œuvrait dans l’entreprise privée et la consultation internationale. Un grand nombre d’entre nous furent inquiets lors de sa dernière hospitalisation pour une lésion au poumon droit en 2005. Un certain courant de sympathie émanait alors d’un peu partout comme si nous redécouvrions l’homme, un bon petit gars de chez nous. Rappelons que Brian Mulroney fut à juste titre la cheville ouvrière du libre-échange, de l’aventure du Lac Meech, de la fameuse TPS et le reste. Des projets pour le moins audacieux!

Ne l’oublions pas non plus, l’ex-premier ministre fut d’abord un homme d’affaires aguerri qui se lança dans la course à la direction du Parti progressiste conservateur, sans expérience politique, et remporta la victoire. Il fallait le faire! Son passage à la tête de l’état fut marqué certes par des initiatives audacieuses, mais plutôt assaisonnées par des changements drastiques qui laissèrent un fort ressentiment chez les Canadiens. L’impopularité de son parti fut à son paroxysme au lendemain du départ du chef; celui-ci a connu la pire défaite de l’histoire électorale du Canada en n’élisant que deux députés. Ce fut le summum de l’impopularité!

Mais voilà qu’en l’espace de quelques jours, ce cher Brian resurgit dans l’arène avec des gants de boxe et prend toute la scène publique avec ses Mémoires, tel un météorite descendu de je ne sais quelle planète. Règlement de comptes avec certains personnages politiques jadis plus populaires que lui, rétablissement de faits historiques, émotions à fleur de peau, larmes à la télé et en conférence de presse, etc. N’est-ce pas les symptômes du syndrome du mal-aimé? Alors que l’histoire commençait tout doucement à reconnaître l’héritage politique de monsieur Mulroney et à redorer son blason, voilà une rentrée historique qui en laissera plusieurs perplexes. La vraie reconnaissance viendra toujours de la population et non d’une ambitieuse stratégie de marketing. Devant cette mise en scène et ce battage publicitaire pour le moins controversés, il faut se rappeler la sagesse de ce proverbe chinois: «À trop vouloir encenser une idole, on la noircit.»

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3 commentaires:

conscience a dit...

Je suis déçu de Monsieur Mulroney. Il est en conflit d'intérêt puisqu'il est membre du conseil d'administration de Quebecor. C'est une rentrée qui laisse perplexe.

Auditeur RVM a dit...

Bonjour,

Monsieur Mulroney se présente tel qu’il a toujours été.
Ce retour sur la scène publique révèle beaucoup de sa personnalité.
Il est un instrument de Quebecor. Je trouve cela dommage.
C’est ça être au service de la convergence. (M.T.)

leravisseur a dit...

Pauvre Brian! Il a toujours été un incompris. Il a laissé le parti conservateur en désastre. Comment un homme de sa stature a pu se laisser entraîner dans cette entreprise de marketing? Sans doute que certains conseillers avaient des intérêts.