10 décembre 2007 - Il n’y a pas une semaine où les maisons de sondage, les études de Statistiques Canada, les rapports d’organisations internationales nous balancent à la figure des images de nous-mêmes. Lorsque l’on compare tous ces chiffres et indices, on se demande dans quel pays nous sommes? Quel monstre sommes-nous en train de devenir, ma foi? Le Canada, terre de la diversité, n’a jamais été aussi vrai. Le Québec d’aujourd’hui n’est plus le même. Est-il en train de se redéfinir? Est-il en train de perdre sa langue commune?
Dans ce Québec en mutation, la langue française reste pour nous l’instrument essentiel de notre culture, de notre identité comme peuple. Mais voilà que Statistiques Canada vient ébranler nos assises. Les Québécois de langue maternelle française ne cessent de fléchir numériquement; ils glissent pour la première fois sous la barre des 80%. Le plus dramatique semble se dessiner à Montréal où les francophones de souche tombent sous la barre des 50%. Du jamais vu!
Jean Charest a beau clamer qu’il faut bien lire les chiffres, que ce n’est pas si dramatique et que le français est globalement en progression dans la province. On lit bien ce que l’on veut lire! Le français est en perte de vitesse à Montréal, c’est une évidence à en crever les yeux. Venant de la Montérégie, j’habite à Montréal depuis près de 20 ans, cela entrecoupé par des séjours à l’étranger. Je trouve inacceptable que l’on me serve en anglais dans un dépanneur de la station de métro St-Henri et dans un restaurant du quartier Hochelaga-Maisonneuve, des quartiers du p’tit monde, jadis francophones mur à mur. Je m’étonne moins si l’on s’adresse à moi en anglais dans Côte-des-Neiges, mais, même dans ce quartier le plus multiethnique en ville, le sang me bouillonne. No way! Non, je n’accepte pas cela!
Nos ancêtres se sont tellement battus pour garder notre langue, notre culture! On dit même que c’est la première fois depuis 1976 que les anglophones sont en progression au Québec. Le nombre de personnes de langue maternelle anglaise au Québec atteint les 607 165, soit 8,2% de la population. Nous savons tous très bien combien Montréal, le cœur du Québec, est menacé depuis des années : nous y retrouvons près de 75% des anglophones. On dit que, fort heureusement, 68,9% des anglos sont bilingues, ce qui dépasse largement le pourcentage des francophones bilingues dans la province. Vivre en anglais en Amérique du Nord n’a rien de si contraignant, mais vivre en français dans cette terre nordique est de l’ordre de la survie, voire du miracle. Que le Premier ministre Charest se réjouisse de la croissance de l’apprentissage du français chez les immigrants ne change rien à la donne, le français perd du terrain.
Pour la promotion du français, il ne faudra pas compter sur le Gouvernement fédéral. Connaissez- vous des ministres anglophones qui parlent bien le français, je dis bien? Il y en a sans doute quelques-uns qui baragouinent des soi-disant mots de la langue de Molière, mais ils ne semblent pas comprendre ce qu’ils disent. Plusieurs se demandent encore l’utilité du Parti du Bloc Québécois à Ottawa; voilà que des études démontrent qu’on parle davantage le français au Parlement depuis l’arrivée du Bloc dans cette vénérable enceinte. À travers ces chiffres inquiétants, la question de l’immigration n’est pas banale.
Le Québec ne peut se maintenir démographiquement et se développer économiquement sans l’immigration. On ne fait plus assez d’enfants pour assurer notre avenir. Ça, c’est aussi grave que la survie du français! Nous ne croyons plus assez en nous, en notre avenir pour peupler notre Québec. C’est viscéralement une question de fond, de sens. Pourquoi mettre des enfants au monde? En fait, pourquoi le Québec ne veut pas d’enfants? Les récentes statistiques sur la natalité ont toutefois signalé un petit boum de la natalité, mais rien de renversant. Le Québec vieillit inexorablement. L’immigration ne règlera que partiellement la question fondamentale de l’avenir du Québec, mais celles du français, de sa culture demeurent entières.
Depuis des décennies, des citoyens et des associations réclament une politique de régionalisation de l’immigration. La majorité des nouveaux arrivants s’établissent dans la grande région montréalaise et réunissent difficilement à s’intégrer harmonieusement, à apprendre un français de qualité. Il serait temps que les autorités gouvernementales soient plus exigeantes et plus sélectives chez les demandeurs de citoyenneté canadienne désireux de vivre au Québec. Madame Pauline Marois a créé tout un émoi dernièrement dans sa déclaration du Nous et des exigences linguistiques minimales pour vivre en citoyen du Québec. Que les détracteurs outrés se calment car elle a fait magistralement mouche! Les sondages démontrent hors de tout doute que, non seulement une majorité de Québécois l’approuve, mais est prête à l’élire.
La question du français reste au cœur de l’avenir de la province. En fait, tous les pays de la francophonie vivent l’érosion; la vague anglophone balaie tout sur son passage. L’avenir de notre langue dépend aussi de nous, de notre volonté commune. C’est aux citoyens du Québec de s’affirmer dans les gestes et les paroles de tous les jours. C’est aussi aux instances gouvernementales de mettre en place des mesures de protection et de promotion de notre langue commune. La loi 101 doit être renforcée et le français valorisé sous toutes ses formes. Si nous aimons et si nous tenons vraiment au français, nous saurons mettre en place des moyens créatifs et porteurs d’avenir. En hommage à Félix Leclerc, Yves Duteil chante cette magnifique chanson intitulée La langue de chez nous. Duteil y prononce ces mots si pertinents: «C'est une langue belle à qui sait la défendre. Elle offre les trésors de richesses infinies. Les mots qui nous manquaient pour pouvoir nous comprendre. Et la force qu'il faut pour vivre en harmonie.» Le génie d’un peuple, son savoir, son âme s’expriment par sa langue; encore faut-il l’aimer, bien la parler, bien l’écrire et surtout la défendre!
Commentez cet article : LeblogueduDG@gmail.com
Dans ce Québec en mutation, la langue française reste pour nous l’instrument essentiel de notre culture, de notre identité comme peuple. Mais voilà que Statistiques Canada vient ébranler nos assises. Les Québécois de langue maternelle française ne cessent de fléchir numériquement; ils glissent pour la première fois sous la barre des 80%. Le plus dramatique semble se dessiner à Montréal où les francophones de souche tombent sous la barre des 50%. Du jamais vu!
Jean Charest a beau clamer qu’il faut bien lire les chiffres, que ce n’est pas si dramatique et que le français est globalement en progression dans la province. On lit bien ce que l’on veut lire! Le français est en perte de vitesse à Montréal, c’est une évidence à en crever les yeux. Venant de la Montérégie, j’habite à Montréal depuis près de 20 ans, cela entrecoupé par des séjours à l’étranger. Je trouve inacceptable que l’on me serve en anglais dans un dépanneur de la station de métro St-Henri et dans un restaurant du quartier Hochelaga-Maisonneuve, des quartiers du p’tit monde, jadis francophones mur à mur. Je m’étonne moins si l’on s’adresse à moi en anglais dans Côte-des-Neiges, mais, même dans ce quartier le plus multiethnique en ville, le sang me bouillonne. No way! Non, je n’accepte pas cela!
Nos ancêtres se sont tellement battus pour garder notre langue, notre culture! On dit même que c’est la première fois depuis 1976 que les anglophones sont en progression au Québec. Le nombre de personnes de langue maternelle anglaise au Québec atteint les 607 165, soit 8,2% de la population. Nous savons tous très bien combien Montréal, le cœur du Québec, est menacé depuis des années : nous y retrouvons près de 75% des anglophones. On dit que, fort heureusement, 68,9% des anglos sont bilingues, ce qui dépasse largement le pourcentage des francophones bilingues dans la province. Vivre en anglais en Amérique du Nord n’a rien de si contraignant, mais vivre en français dans cette terre nordique est de l’ordre de la survie, voire du miracle. Que le Premier ministre Charest se réjouisse de la croissance de l’apprentissage du français chez les immigrants ne change rien à la donne, le français perd du terrain.
Pour la promotion du français, il ne faudra pas compter sur le Gouvernement fédéral. Connaissez- vous des ministres anglophones qui parlent bien le français, je dis bien? Il y en a sans doute quelques-uns qui baragouinent des soi-disant mots de la langue de Molière, mais ils ne semblent pas comprendre ce qu’ils disent. Plusieurs se demandent encore l’utilité du Parti du Bloc Québécois à Ottawa; voilà que des études démontrent qu’on parle davantage le français au Parlement depuis l’arrivée du Bloc dans cette vénérable enceinte. À travers ces chiffres inquiétants, la question de l’immigration n’est pas banale.
Le Québec ne peut se maintenir démographiquement et se développer économiquement sans l’immigration. On ne fait plus assez d’enfants pour assurer notre avenir. Ça, c’est aussi grave que la survie du français! Nous ne croyons plus assez en nous, en notre avenir pour peupler notre Québec. C’est viscéralement une question de fond, de sens. Pourquoi mettre des enfants au monde? En fait, pourquoi le Québec ne veut pas d’enfants? Les récentes statistiques sur la natalité ont toutefois signalé un petit boum de la natalité, mais rien de renversant. Le Québec vieillit inexorablement. L’immigration ne règlera que partiellement la question fondamentale de l’avenir du Québec, mais celles du français, de sa culture demeurent entières.
Depuis des décennies, des citoyens et des associations réclament une politique de régionalisation de l’immigration. La majorité des nouveaux arrivants s’établissent dans la grande région montréalaise et réunissent difficilement à s’intégrer harmonieusement, à apprendre un français de qualité. Il serait temps que les autorités gouvernementales soient plus exigeantes et plus sélectives chez les demandeurs de citoyenneté canadienne désireux de vivre au Québec. Madame Pauline Marois a créé tout un émoi dernièrement dans sa déclaration du Nous et des exigences linguistiques minimales pour vivre en citoyen du Québec. Que les détracteurs outrés se calment car elle a fait magistralement mouche! Les sondages démontrent hors de tout doute que, non seulement une majorité de Québécois l’approuve, mais est prête à l’élire.
La question du français reste au cœur de l’avenir de la province. En fait, tous les pays de la francophonie vivent l’érosion; la vague anglophone balaie tout sur son passage. L’avenir de notre langue dépend aussi de nous, de notre volonté commune. C’est aux citoyens du Québec de s’affirmer dans les gestes et les paroles de tous les jours. C’est aussi aux instances gouvernementales de mettre en place des mesures de protection et de promotion de notre langue commune. La loi 101 doit être renforcée et le français valorisé sous toutes ses formes. Si nous aimons et si nous tenons vraiment au français, nous saurons mettre en place des moyens créatifs et porteurs d’avenir. En hommage à Félix Leclerc, Yves Duteil chante cette magnifique chanson intitulée La langue de chez nous. Duteil y prononce ces mots si pertinents: «C'est une langue belle à qui sait la défendre. Elle offre les trésors de richesses infinies. Les mots qui nous manquaient pour pouvoir nous comprendre. Et la force qu'il faut pour vivre en harmonie.» Le génie d’un peuple, son savoir, son âme s’expriment par sa langue; encore faut-il l’aimer, bien la parler, bien l’écrire et surtout la défendre!
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7 commentaires:
Je lis à tous les jours vos articles. C’est excellent. Je ne sais ou vous prenez le temps pour produire tout cela. J’y trouve toujours de la qualité tant au niveau de la réflexion et de langue. Merci pour cet excellent texte sur notre langue commune ! (C.D.)
Bravo ! Bravo ! Bravo ! Je suis entièrement d’accord avec vos propos. (T.R.)
Merci pour ce magnifique texte sur le français. Je vis dans Côte-des-Neiges et j’éprouve les mêmes sentiments que vous. On m’adresse toujours en anglais quand je vais à l’épicerie, au restaurant. Il est temps que nos gouvernements fassent quelque chose. On perd la langue qui nous unit. Je n’ai pas l’impression que Charest y croit. (M.B.)
Sauvons notre langue ! Il faut tout faire ! Notre langue passe avant tout. Si on veut bien intégrer les immigrant, il est nécessaire d’offrir des cours de langue française de qualité. Il importe que les Québécois parlent bien leur langue. On ne peut transmettre correctement ce que l’on ne connaît pas bien. (L.T.)
Je suis enseignante de français au secondaire depuis sept ans et ce dans la couronne nord de Montréal. Je vois la langue anglaise gagner du terrain d'année en année. Dans ma banlieue, il y a 5-6 ans, je n'entendais à peu près personne s'adresser la parole en anglais. Maintenant, c'est fréquent.
Pour moi, ne pas reconnaître sa culture, ne pas l'aimer, ne pas la défendre relève d'un profond malaise identitaire et d'une profonde assimilation. On a beau dire, on a beau faire, ce débat linguistique est difficilement «séparable» du sempiternel débat polique québécois. Vraiment, en ce moment, j'ai peu d'espoir en ce qui concerne la conservation de la langue et de la culture françaises en Amérique du Nord.
Je crois que plusieurs Québécois oublient que nous sommes les seuls et uniques défenseurs de la langue française dans tout le continent américain. C'est énorme. Peut-être trop pour un peuple qui, en ce temps des débats sur les accommodements raisonnables, se replie sur lui-même et fait preuve de xénophobie crasse. Pour assumer une telle responsabilité, il faut être fier. Je doute qu'une majorité de Québécois le soit...
Cher Jean-Guy. Entièrement d'accord. Mais il faut dire plus encore. Tous ceux qui prennent le micro ou la plume pour s'adresser au public ont une responsabilité éducative vis-à-vis du français. Quand on écoute et qu'on lit tout ce qui passe par la presse parlée ou écrite, il y a lieu de s'interroger sérieusement.
Les publicitaires ont également une responsabilité que souvent ils ignorent. Le joual et les sacres n'ont pas leur place en ces lieux et pourtant à voir et écouter ce qui se fait, c'est scandaleux. Que fait la SRC et tous les autres médias à ce chapitre? Poser la question c'est deviner la réponse.
Même Le Devoir quand il écrit qu'il fait frette manque de respect.
Un grand examen s'impose car si c'est cela la culture québécoise: elle est inexportable.
Gilles Tilley
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