(111) Un demi-million plus tard!

22 février 2008 - Un événement très attendu était celui du rapport Castonguay rendu public en début de semaine. Enfin, allions-nous trouver un peu de lumière au bout du tunnel après tant d’années de tergiversations? Plus les gouvernements changent, plus les ministres de la santé se succèdent, plus notre réseau de la santé s’enchevêtre dans les méandres des déficits et des coupures. On ne sait plus par quel bout prendre ce bateau à la dérive, ce Titanic en naufrage. Notre système de santé est aux soins palliatifs, mes amis. Il lui faudrait un remède de cheval pour le sortir du pétrin. Et quel pétrin!

Le comité Castonguay, mis en place par le gouvernement Charest, avait pour mandat d’analyser la situation financière de notre système de santé et de proposer des avenues concrètes afin de faire face aux coûts sans cesse croissants. Le comité n’a pas lésiné sur les moyens, que l’on pourrait qualifier de drastiques, afin de redonner un peu de colonne vertébrale à un système sclérosé. J’ai l’impression que les membres du comité ont ratissé très large, sans doute trop. On se retrouve certes devant une liste d’épicerie hâtivement préparée, mais qui compte quand même d’excellentes idées.

Sans nul doute que certaines mesures avaient de quoi faire sourciller ou plutôt sursauter notre cher ministre de la Santé. Pour financer la santé, il faut de l’argent; on n’en sort pas par un tour de magie, mes amis! Le comité s’est attardé à trouver les ressources financières pour colmater l’hémorragie endémique de notre système de santé. Il ne fallait pas s’attendre à des solutions à l’eau de rose. Le groupe Castonguay a proposé, entre autres, une hausse de la TVQ, une cotisation annuelle aux patients des cliniques, une ouverture à l’intervention du privé, le recours à l’assurance privée pour des services déjà couverts par le régime public, la hausse des primes de l’assurance médicaments, etc. Des recommandations qui ont créé un tremblement de terre dans le milieu de la santé et des remous dans le milieu politique.

Voilà donc que notre super ministre de la Santé, Philippe Couillard, a fait savoir que ce rapport ne passe pas la rampe, qu’il ne tient pas la route. Ce rapport, selon le ministre propose sept recommandations inacceptables et six recevables. Il fallait s’y attendre, les avenues inacceptables sont sans contredit les plus décisives et controversées, mais salvatrices. Dans un gouvernement minoritaire qui cherche une majorité lors des prochaines élections, pas trop de vagues et de mesures impopulaires, madame la marquise. Déjà, avant la publication du rapport Castonguay, nous devinions presque le sort réservé à ce rapport qui a coûté pas moins d’un demi-million de dollars aux contribuables québécois. C’est inacceptable quand on souffre d’une pénurie financière dans le domaine crucial de la santé.

La question de fond n’a rien à voir avec la compétence et l’expertise des membres de cette commission. La vraie question est pourquoi le gouvernement demande à un comité d’experts d’effectuer un travail quand il savait qu’il en rejetterait la plupart des recommandations? Sans doute que le gouvernement s’attendait à ce que le comité propose des avenues épousant la vision et les stratégies gouvernementales. Même la ministre des finances Jérôme-Forget avoue avoir indiqué aux membres de la commission, dès le début de leurs travaux, de ne pas toucher à la TVQ. Il est certain que tout n’est pas réalisable dans ce rapport parce qu’il ne va pas assez en profondeur malgré ses 300 pages. Ce n’est pas le nombre de pages qui donnent de la pertinence à un rapport. Sans doute qu’il y a eu divergences de points de vue dans ce comité, notamment de la part de Michel Venne qui ne manque pas de le signaler en annexe au rapport.

Il y a quelques semaines, le Journal de Montréal avait publié dix idées chocs pour relancer le Québec sur le chemin de la prospérité. C’est un peu la même médecine que présentent les membres du comité. Il faut cesser de tourner en rond et prendre les décisions les plus courageuses pour sauver notre système public de santé. Il faut se donner un système de santé dont on peut assumer les coûts. Nous rêvons d’une voiture de luxe, mais nous n’avons que les moyens de nous payer qu’une voiture intermédiaire. Il faut être réalistes et offrir ce que les Québécois sont prêts à payer. C’est le gros bon sens!

Depuis quelques jours, de nombreux ténors de tous les secteurs de la santé ont pris parole. Il fallait s’attendre à ce que les syndicats manifestent bruyamment; c’est difficile de les éviter, car ils sont partout. Les notes discordantes, voire acerbes dans certains cas, n’ont pas ébranlé l’éminent Claude Castonguay, père de notre système public de santé. Il semble qu’il était presque convenu dans les coulisses du pouvoir qu’il n’y aurait pas de mesures concrètes impopulaires contenues dans ce rapport qui seraient mises en application. Le rapport Castonguay aura sans doute le mérite d’avoir brassé les idées toutes faites et ébranlé les ornières dans lesquelles se sont empêtrés nos dirigeants d’établissements de santé et notre gouvernement. Vous conviendrez avec moi que c’est un prix fort bien payé pour une tempête d’idées.

S’il n’y a pas de mesures courageuses prises à court terme par nos gouvernements, soyez certains que l’on parlera encore pendant de nombreuses années des listes d’attente, des déficits, de l’exode de nos meilleurs médecins. Notre système de santé est habité par un système de castes où chacune protège son butin et ses arrières. Ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que nos établissements de santé accueillent des personnes vulnérables, fragilisées qui, dans leur drame, ont besoin d’être soigné avec diligence, respect et professionnalisme. Nous ne soignons pas des maladies dans nos établissements, mais des personnes avec un cœur et une âme. Que le ministre fasse presque la sourde oreille au rapport Castonguay, c’est une chose, mais la réalité est flagrante. Ce rapport prendra la route de la filière treize comme bien d’autres qui l’ont précédé. Pendant ce temps, nos élus auront la conscience tranquille, mais n’ayez crainte, pas pour longtemps car rien n’est réglé. Dire que le gouvernement Charest a fait de la santé sa première priorité!

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3 commentaires:

Auditeur RVM a dit...

(Jean Samson) J’en ai assez des discussions, des commissions, des ministres de la santé. Personne ne peut gérer cette grosse « bibite » que l’on a créée. C’est un gouffre financier que l’on ne maîtrise plus. (26-02-08)

Auditeur RVM a dit...

(L. St-André) Je fais du bénévolat dans le milieu hospitalier. RÉUNIONS, RÉUNIONS ETC. J ai une assurance. Que Dieu me protège. Amen (25-02-08)

Auditeur RVM a dit...

(Hugues Lampron) Quelle belle réflexion ! Oui, tout le monde se protège dans le dossier de la santé. En effet, j’y ai travaillé et c’est très vrai qu’il y a un système de castes. Il est temps que l’on fasse du ménage dans ce système qui ne cesse de déraper. Dommage que le rapport Castonguay a été mis de côté. (23-02-08)