( 62 ) Pingres les Québécois ?

6 novembre 2007 - Tous les jours ou presque, nous sommes sollicités par l’un et l’autre afin d’aider des organismes de charité. Appels téléphoniques, lettres, sollicitations à la porte, activités bénéfice, tout le monde quête! Statistique Canada vient tout juste de publier son document Dons de charité. On y apprend que les Canadiens sont généreux, qu’ils l’ont été davantage en 2006, mais moins nombreux à ouvrir leur porte-monnaie que l’année précédente. Globalement les dons de charité ont totalisé 8,5 milliards au pays, soit une hausse de 8,3% par rapport à 2005. Comment les Québécois se situent-ils dans l’ensemble canadien?

Dans la province, ces 1,3 millions de Québécois qui ont donné 780 millions de dollars, une hausse de 5,6% pour les dons. Fait à noter, c’est la plus petite augmentation parmi toutes les provinces canadiennes. Le Québec se classe parmi les provinces les moins généreuses, il occupe le 9e rang. Année après année, il se retrouve bon dernier! Ce rapport n’indique toutefois pas les dons qui n’ont pas été réclamés dans les déclarations de revenus, le bénévolat et les dons de biens. Globalement, les Québécois semblent mettre beaucoup moins la main dans leur poche pour aider leurs semblables. Les Québécois seraient-ils pingres?

Abbosford en banlieue de Vancouver est la ville la plus généreuse au pays avec un don médian de 620$ contre 150$ pour Montréal et 100$ pour Québec. D’après d’autres études, le Québec se fait tirer l’oreille aussi dans le domaine du bénévolat. Les Québécois sont aussi généreux de leur temps, mais beaucoup moins que dans les autres provinces canadiennes; 34% au Québec contre 45% au niveau national. Il est bon de signaler que les trois quarts des dons des Canadiens ne sont pas comptabilisés au fisc. Seulement un peu plus de 20% des déclarations d’impôts contiennent des réclamations à cet égard. En fait, pourquoi donner?

Il y a plus de 80 000 organismes de charité au Canada. Cela fait beaucoup! Donner est un acte essentiel à la vie. La vie est un don et elle appelle le don. Celui qui donne se préoccupe des besoins de l’autre, souvent du plus démunis, du plus meurtri par la vie. Désir de partage et de solidarité? La pièce de monnaie que l’on laisse tomber dans la main du mendiant sur le coin de la rue, c’est un geste de compassion qui ne changera certes pas le sort du monde. Mais ce geste individuel, au hasard d’une rencontre, devient une manière de se dire, de parler à l’autre. Donner de l’argent est toujours plus facile que d’entrer en relation; donner de son temps, de son savoir et de son talent font appel à des motivations encore plus profondes. Donner de l’argent, nous le savons, ne suffit pas! Il faut que des hommes et des femmes d’ici fassent le don d’eux-mêmes pour que des choses changent, que des barrières tombent, que des frontières reculent dans ce monde.

Les exemples à travers l’humanité ne manquent pas. Spontanément nous pensons à Mère Teresa, Jean Vanier, l’Abbé Pierre, Sœur Emmanuelle. Le don ne peut se passer des principes de justice et d’équité, si nécessaires en un temps d’inégalités sociales flagrantes. L’argent que l’on tend ne doit pas excuser nos paresses humaines ou nos politiques sociales mal ficelées. Les exigences de la fraternité humaine nous obligent au partage, à la solidarité. C’est une obligation morale que de soutenir la communauté humaine dans la mesure de nos possibilités. On dit souvent que «Donner, c’est recevoir.» Celui qui donne ne reçoit pas nécessairement l’équivalent, mais il est convaincu qu’il recevra autre chose, autrement.

Un intervenant social me rapportait un jour les paroles bouleversantes qu’un itinérant lui avait adressées: «Tu me donnes de la nourriture, des vêtements et de l’argent sans me regarder. Au fond, tu n’attends rien de moi.» Le don dépasse le matériel, il va toucher directement le cœur de celui qui donne et de celui qui reçoit. Avant le faire ou le bien matériel, il y a dans le geste du donateur comme un acte de raison et comme un acte d’amour. Les Québécois vivent dans une société marquée par l’hédonisme, l’individualisme et le confort. Pour plusieurs, c’est toujours trop exigeant d’aider les autres, trop coûteux de participer à une activité bénéfice. Mais il y a tant de petites douceurs ou de superflus que l’on se paie sans regarder le prix.

Selon plusieurs analystes, le Québec n’a pas su au fil du temps développer la culture du don comme c’est le cas dans plusieurs pays d’origines anglo-saxonnes. On dirait que bon nombre de Québécois sont plus enclins à profiter de tout à satiété; après tout, nous sommes réputés bons vivants! Il faut dire, pour leur défense, qu’ils sont quand même les plus taxés en Amérique du Nord. Khalil Gibran disait: «Vous ne donnez que peu lorsque vos donnez vos biens. C’est lorsque vous donnez de vous-mêmes que vous donnez réellement.» Pingres les Québécois? Voyons donc!


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3 commentaires:

Auditeur RVM a dit...

Je fais des dons tous les ans. On ne peut pas donner à tout le monde. Il y a trop d’organismes. Même le gouvernement quête! (C.L.)

Auditeur RVM a dit...

Un bon article! Je trouve qu’aujourd’hui, les parents n’apprennent plus aux jeunes à être généreux. Les gens veulent tout avoir. Les jeunes sont rois. La culture du don, comme vous le dites, cela s’apprendre. Il est nécessaire d’éduquer nos enfants à donner de leur temps au lieu de passer des heures devant l’ordinateur, les jeux vidéos ou les films. Trop de jeunes n’ont pas appris à être bénévoles. Les professeurs à l’école ne favorisent pas cela. Ils sont là pour le salaire. Plusieurs s’en foutent des élèves! (C.C.)

Auditeur RVM a dit...

Je ne suis pas d’accord avec vos propos. Je trouver que l’on donner tellement. Nous sommes taxés comme jamais. Il y a beaucoup de gens qui donnent du temps aux plus pauvres. Moi, c’est ma façon. Je n’ai pas assez d’argent pour faire la charité. (M.T.)